Déclaration de la “Campagne pour Un seul État Démocratique”
Déclaration de la campagne pour Un seul État Démocratique –
L’alternative : Construire un mouvement de libération contre un régime colonial, ne pas manifester pour défendre « la Démocratie juive »
21 février 2023
Depuis que le ministre israélien de la Justice Yariv Levin a annoncé des « réformes » radicales dans le système juridique d’Israël dans le but d’invalider le pouvoir de la Cour Suprême de déclarer des lois inconstitutionnelles et de remplir le système judiciaire de politiciens appointés, un régime fondé sur le colonialisme de peuplement, l’apartheid et la suprématie juive sur les Palestiniens a débattu sur la façon de se préserver en tant de « démocratie ». Un mouvement croissant de protestation s’est élevé appelant à la désobéissance civile, avec entre autres des déclarations « militantes » de désobéissance par d’anciens hauts responsables politiques, de la sécurité et de l’armée.
Personne ne peut prédire comment se terminera cette confrontation. Il est clair, cependant, qu’elle ne représente qu’un conflit sioniste en interne. Les manifestations ne font jamais référence à l’autre côté de la « démocratie » israélienne : l’exclusion des citoyens arabes qui, comme les leaders de « l’opposition » le disent clairement, ne sont jamais bienvenus dans les rangs des manifestations ni même considérés comme faisant partie du système politique. Au contraire. La direction de l’opposition pense qu’une participation visible de Palestiniens dans les manifestations pourrait en réalité nuire à la lutte contre le gouvernement parce qu’elle donnerait à la coalition gouvernementale de Netanyahou, Ben Gvir et Smotrich un prétexte pour diffamer les manifestations comme étant « antisionistes ». Et, cela va sans dire, ceux qui se battent pour « préserver la démocratie », les « libéraux » sionistes, n’ont jamais prétendu reconnaître leurs droits nationaux et démocratiques aux Palestiniens qui vivent sous un régime cruel d’apartheid colonial dans le Territoire Occupé de 1967, les camps de réfugiés et l’Exil.
Peu importe si la coalition et l’opposition en Israël parviennent à un accord ou si les dissensions entre l’État et les colons demeurent incurables, notre peuple palestinien poursuivra son combat et sa détermination légendaire. Néanmoins, étant donné les réalités politiques, un débat est né parmi l’élite politique des Palestiniens de 1948 sur la meilleure façon de répondre aux événements. Les meneurs de certains partis politiques arabes et une poignée de militants appellent à participer aux manifestations de l’opposition sioniste. Cependant, l’écrasante majorité de notre peuple se retient de participer, consciente de la contradiction morale et du dommage politique que comporte cette participation.
Nous ne sommes pas face à une lutte de classe. Le projet colonial et les privilèges qu’il fournit à la société coloniale empêchent le développement d’une conscience de classe. Il ne s’agit pas non plus d’une lutte pour trouver les solutions nécessaires pour mettre fin aux crimes de l’occupation, du colonialisme et de l’apartheid, ou pour mettre fin aux souffrances du peuple palestinien. Nous sommes plutôt simplement les témoins d’une lutte contre ceux qui façonnent et contrôlent le régime d’apartheid, tout ceci dans le but de préserver la suprématie juive et le pouvoir colonial. Et pour les Palestiniens, peu importe qui contrôle le système judiciaire. Qu’il s’agisse de sionistes libéraux ou conservateurs, les tribunaux, du plus petit au plus grand, continueront de légitimer et et de renforcer les crimes d’expulsion, de massacres et de nettoyage ethnique, tous étant essentiels pour préserver l’appareil de l’État israélien au détriment de la majorité palestinienne entre le Fleuve et la Mer.
Pour toutes ces raisons, les citoyens palestiniens refusent de participer aux manifestations qui visent à protéger la « démocratie juive ». Les Palestiniens et les Juifs qui s’opposent à l’apartheid et au colonialisme de peuplement doivent continuer à construire un mouvement de résistance uni ; ils ne doivent pas se laisser distraire par des « manifestations » qui ne font que légitimer une fausse démocratie et renforcent en réalité le système répressif de colonisation et de contrôle. Un mouvement de libération authentique exige une stratégie de résistance à long terme, une vision de libération nationale et humaine. Il devrait rassembler ceux qui vivent en Palestine et ceux qui ont été expulsés par le mouvement sioniste et son incarnation, l’État d’Israël. Ce mouvement devrait proposer une alternative claire : la construction d’un seul État démocratique dans la Palestine historique sur les ruines du régime d’apartheid et ses ramifications criminelles.
Voilà la véritable alternative à la participation à un mouvement de protestation pour la préservation d’un régime colonial raciste. C’est une alternative réaliste, qui exige une lutte longue et ardue. Mais elle nous conduit dans la bonne direction politique, à la différence des manifestations qui ne font qu’offrir des améliorations cosmétiques à un système d’oppression injuste et violent. On ne peut atteindre ce but qu’avec un mouvement national démocratique palestinien qui, après s’être reconstruit, retrouverait sa vision humaine libératrice et mobiliserait autour d’un programme politique – à notre avis, celui d’un seul État démocratique sur toute la Palestine historique. Cela exige l’articulation combinée d’une lutte populaire interne et d’une lutte externe telle qu’incarnée dans la stratégie du boycott et la force de la solidarité internationale.
Traduction : J. Ch. pour BDS France Montpellier
The One Democratic State Campaign – ODSC
[La Campagne pour Un seul État Démocratique]
(NDLR) :
“La campagne pour un seul État démocratique est une initiative dirigée par les Palestiniens qui appelle à la fin du régime sioniste colonial et s’efforce d’établir un seul État démocratique en Palestine historique, fondé sur la justice politique, sociale, économique et culturelle, dans lequel les Palestiniens et les Juifs israéliens vivent dans l’égalité.
La campagne pour un seul État démocratique (ODSC) a été lancée par des militants Palestiniens et des Juifs israéliens, des intellectuels et des universitaires au début de 2018 dans la ville de Haïfa. Elle aspire à coopérer et à se coordonner avec des individus et des groupes, à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine historique, qui cherchent à obtenir la libération. Nous travaillerons à transformer notre campagne en un vaste mouvement populaire, guidé par un programme politique clair, une organisation de base participative et transparente, et une stratégie efficace pour atteindre notre objectif d’un État démocratique dans toute la Palestine historique, inclusive, dans lequel les réfugiés palestiniens et leurs descendants retournent chez eux.
Notre campagne se considère comme faisant partie du mouvement mondial de libération humaine, y compris les forces progressistes du monde arabe qui luttent pour un ordre régional et mondial juste. “(…)