Dites-le à Puma : s’il s’oppose au racisme, il doit s’opposer à l’occupation israélienne
Mahmoud Sarsak (Photo: Ashraf Amra/APA Images)
Black Lives Matter force le monde des sports à faire face au racisme – pourtant le préjudice qui a détruit ma carrière est en grande partie ignoré –
Par Mahmoud Sarsak 10 septembre 2020
Puma a appelé à mener des actions contre la haine. Pourquoi soutient-il la haine qui détruit des vies et empoisonne un sport magnifique ?
Il y a huit ans, ma vie a changé pour toujours. J’avais 22 ans et je vivais mon rêve de footballeur. Je faisais partie de l’équipe nationale, j’avais représenté mon pays aux Jeux olympiques, et je venais de signer un contrat en Cisjordanie. Mais sur le chemin d’une rencontre avec ma nouvelle équipe, j’ai été appréhendé par les forces de sécurité israéliennes. Je n’ai été inculpé d’aucun crime ou délit, je n’ai pas été poursuivi en justice, et cependant j’ai été incarcéré pendant trois ans et brutalement torturé. Ce n’est qu’à la suite d’une grève de la faim de 96 jours que la pression internationale a forcé le régime israélien à me libérer.
L’ombre d’un jeune Palestinien qui joue au football se découpe devant une banderole de solidarité avec le prisonnier palestinien Mahmoud Sarsak dans le sud de la Bande de Gaza, le 10 juin 2012. (Photo: Eyad Al Baba/APA Images)
Pourquoi moi ? Mon seul désir avait toujours été de jouer au football. Mon souhait le plus vif était d’utiliser mes capacités pour faire honneur à mon peuple. De faire partie d’un sport qui, pour moi, est lié à la paix, à l’amour et aux relations avec d’autres pays et cultures. Mais, aux yeux d’un régime qui a besoin que le monde ferme les yeux sur la haine, l’injustice et les violations contre mon peuple, cela fait de moi une menace. En effet, quand nous, les Palestiniens, entrons dans l’arène internationale, cela rappelle au monde que nous existons, que nous sommes aussi humains que vous, et que nous méritons le même respect, les mêmes protections élémentaires, que tout un chacun. Voilà pourquoi nous voyons les talents palestiniens étouffés et attaqués par tous les moyens possibles. Voilà pourquoi nous voyons des restrictions et des interdictions viser les matchs, empêcher l’entraînement et la présence de supporters, et imposer aux personnalités du sport et de la culture le risque de l’emprisonnement, de l’exil et de la mort.
Mahmoud Sarsak à Montpellier , 5 avril 2013
Aujourd’hui, je vois que Black Lives Matter force le monde du sport à faire face au racisme et à la haine – et pourtant le préjudice qui a détruit ma carrière est en grande partie ignoré. Le géant du vêtement de sport Puma a pris position publiquement contre la haine, publiant des annonces et accueillant des “conversations franches” sur le racisme. Et pourtant il continue à être complice de l’assujettissement de mon peuple. Puma est le principal parrain de l’Association israélienne de football, laquelle, selon Human Rights Watch, comporte des clubs de football basés dans des colonies qui occupent des terres palestiniennes volées. Les colonies sont illégales en vertu du droit international humanitaire, contribuent à de graves atteintes aux droits humains, et nuisent directement aux droits des Palestiniens : liberté de circulation, accès aux ressources naturelles et capacité de construire des maisons. Au lieu de s’opposer à cette injustice, le parrainage de Puma confère une légitimité internationale à l’Association israélienne de football, détournant l’attention des violations croissantes et de la haine que subit le peuple palestinien.
Nous ne pouvons pas faire notre choix quand il s’agit de racisme. Soit nous nous dressons contre toutes les haines et toutes les violations des droits et de l’humanité, soit nous faisons partie du problème. Actuellement, Puma fait partie du problème.
Merci de vous joindre à moi en demandant à Puma d’être fidèle à ses propres paroles — et de vous joindre aux athlètes palestiniens pour boycotter Puma.
Pour plus d’informations : redcardpuma.com.
Mahmoud Sarsak
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À 22 ans, Mahmoud Sarsak était une étoile montante du football palestinien et venait de signer un contrat avec un nouveau club, Markaz Balata. Mais en juillet 2009, alors qu’il se rendait de Gaza en Cisjordanie pour rejoindre son équipe, il a été arrêté et emprisonné sans inculpation par Israël. Pendant les trois années qui ont suivi, il a subi de façon répétée des tortures physiques et mentales, et il a finalement entamé une grève de la faim qui a duré 96 jours. Après une campagne internationale soutenue par des personnalités du football comme Eric Cantona ou l’ancien président de la FIFA Sepp Blatter, le régime israélien s’est incliné devant la pression et l’a libéré. Pour des détails sur l’histoire de Mahmoud, voir son interview en vidéo ici : https://www.palestinecampaign.org/mahmoud-sarsak-tells-his-story-to-the-uk/
Traduction : SM pour BDS France