La guerre acharnée d’Israël contre les enfants palestiniens
« L’humanité doit à l’enfant ce qu’elle a de meilleur à offrir » – Préambule à la Déclaration des droits de l’enfant de l’ONU (1959).
Plus de la moitié de la population vivant en Cisjordanie et dans la bande de Gaza a moins de 18 ans ; en fait, on peut dire avec certitude que la moitié des habitants de la Cisjordanie occupée et de la bande de Gaza assiégée sont des enfants. Quiconque mène une guerre contre ces deux territoires, par la démolition de maisons, les arrestations sans procès, la politique du « tirer pour tuer » et la volonté d’humilier, mène une guerre contre les enfants.
Parfois, des brigades entières de l’armée israélienne, accompagnées d’unités d’élite, de la police des frontières, poursuivent un garçon et, dans la plupart des cas, le tuent ou au mieux le kidnappent.
S’il y a quelque chose qui a changé au cours des dernières années dans ce que les Nations Unies ont finalement accepté d’appeler la colonisation de la Palestine, c’est l’intensification de la politique israélienne du « tirer pour tuer ». Et bien que beaucoup d’entre nous comprennent que le nouveau gouvernement israélien ne changera pas les politiques menées par les gouvernements précédents, on peut s’attendre à de nouveaux sommets de brutalité dans la guerre contre les enfants de Palestine.
Au moment où j’écris ces lignes, la nouvelle nous est parvenue du meurtre par des soldats israéliens de Fulla Rasmi Abd al-Aziz al-Musalamah. Elle était en route pour fêter son 16e anniversaire. Elle était avec d’autres personnes dans une voiture près de Beitunia, lorsque les soldats, sans aucune raison, ont ouvert le feu sur la voiture et l’ont tuée.
Inutile de dire que le journal israélien qui a relaté l’ « incident » a accusé le conducteur et n’a même pas pris la peine de mentionner son nom.
Le meurtre d’enfants n’est pas un aspect nouveau de la politique israélienne à l’égard des Palestiniens.
En avril 1948, le commandement militaire des forces sionistes a commencé à définir plus clairement sa politique à l’égard de toute population qui resterait dans les villages occupés lors du nettoyage ethnique de 1948. L’une de ses directives claires était de tuer sur place ou d’envoyer dans un camp de prisonniers, à la discrétion du commandant présent, « les hommes en âge de combattre ».
Le commandement définissait clairement ce que l’on entend par « hommes » : toute personne âgée de plus de dix ans.
Comme toute politique israélienne destructrice depuis l’expulsion massive et les massacres de 1948, une nouvelle méthode d’action et de politique qui ne cesse d’empirer est devenue la norme.
Il s’agit d’une politique très trompeuse, car quiconque veut la dénoncer se retrouve confronté au meurtre épisodique d’une ou deux personnes, et les points ne sont pas faciles à relier pour produire une accusation accablante. C’était vrai au début des années 1950, mais bien sûr, depuis lors, les chiffres sont écrasant et ces meurtres en augmentation constante sont beaucoup plus visibles.
En novembre 1950, l’armée israélienne a abattu trois enfants, âgés de 8, 10 et 12 ans, du village de Yalo, tandis qu’en 1952, un commando israélien a assassiné 4 enfants, âgés de 6 à 14 ans, à Beit Jalla. Un an plus tard, parmi les cinq bergers que les Israéliens ont tués en février 1953, l’un d’entre eux était un garçon de 13 ans, originaire d’al-Burg.
L’infanticide progressif est parfois remplacé par un meurtre plus intensif d’enfants. Pendant la première Intifada, selon l’association des médecins israéliens et palestiniens pour les droits de l’homme, toutes les deux semaines, un enfant de moins de six ans était tué d’une balle dans la tête par l’armée israélienne.
Pendant la deuxième Intifada, 600 enfants palestiniens ont été tués. Parmi eux, on compte Muhammad al-Dura, 12 ans, Fairs Odeh, 14 ans, et Khalil al-Mughrabi, 11 ans. Cinq mille enfants ont été blessés. En 2007, l’armée de l’air israélienne a tué 8 enfants de la famille Shehadeh à Gaza.
Lors de la première vague d’attaque sur Gaza en 2008, plus de 300 enfants ont été tués, et 30 autres en 2012. Et le plus grand nombre de décès a été enregistré en 2014, avec plus de 550 enfants.
Autrement dit, depuis 2000, 2250 enfants palestiniens ont été tués par l’armée et les forces de sécurité israéliennes. Cela équivaut au meurtre de près de 45 000 enfants en Grande-Bretagne par une force militaire ou policière depuis 2000.
Pourquoi est-il si important d’enregistrer ces données sinistres et horribles et de définir clairement leur signification juridique et morale ? Pour quelques raisons que voici.
Premièrement, le fait qu’il n’y ait qu’ici, dans un média alternatif, que vous soyez au courant de ces atrocités, est une indication de l’hypocrisie des moyens dominants d’information et de l’élite politique occidentale lorsqu’il s’agit de la Palestine, comparée à la compassion manifestée envers les enfants en Ukraine ou en Iran.
Deuxièmement, ces chiffres accentuent la menace existentielle que le sionisme et Israël représentent toujours pour le peuple palestinien et son avenir. Ce n’est pas seulement la terre qu’Israël convoite ; il a l’intention de poursuivre la destruction du peuple lui-même.
Mais le plus important est l’exaspérante exclusion de la Palestine du débat international sur les massacres en général et ceux d’enfants en particulier. Prenez par exemple la définition internationale du massacre. Elle est définie comme suit :
« Les actions délibérées de groupes armés, y compris, mais sans s’y limiter, les forces de sécurité de l’État… qui entraînent la mort d’au moins 1000 civils non-combattants ciblés en tant que membres d’un groupe spécifique sur une période d’un an ou moins. »
Lors de la première et de la deuxième Intifada, en 2009 et en 2014, le nombre de Palestiniens tués par Israël a dépassé de loin le millier. Nulle part dans l’ONU ou une autre organisation humanitaire recensant les massacres de masse dans le monde, les Palestiniens n’apparaissent comme un cas d’étude.
Il ne s’agit pas de chiffres bien sûr, mais bien plus de l’idéologie qui facilite ces massacres ; une sorte d’inhumanité qui n’est possible que si les humains que vous ciblez sont déshumanisés. Une idéologie qui conduit dans de nombreux cas à des politiques génocidaires.
La définition du génocide selon l’article 2 de la charte des Nations unies sur le génocide inclut les massacres, les atteintes à l’intégrité physique et mentale et la dégradation physique comme indicateurs de ces politiques.
Le rapport du représentant spécial du Secrétaire général d’octobre 2009 et mis à jour en novembre 2013, énumère six violations graves du droit international des droits de l’homme concernant les droits des enfants dans les conflits armés.
Il n’y a pas de conflit armé en Palestine et pourtant, trois de ces graves violations se produisent quotidiennement en Cisjordanie colonisée et, sur une base régulière, en nombre massif, dans la bande de Gaza assiégée.
Le meurtre et la mutilation d’enfants, les attaques contre les écoles et les hôpitaux, et le refus de l’accès humanitaire… Certaines des politiques israéliennes mises en œuvre pendant le siège de Gaza, en termes de privation de nourriture, de ressources énergétiques et surtout d’aide médicale, constituent un critère à part entière qui aurait dû être ajouté à ce document.
En août de cette année, la responsable des droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet, a exprimé son inquiétude quant au nombre élevé de Palestiniens, y compris des enfants, tués et blessés dans le territoire palestinien occupé depuis le début de l’année 2022. Elle faisait référence au meurtre de 37 enfants depuis le début de l’année jusqu’au mois d’août et était particulièrement horrifiée par le meurtre de 19 enfants en une semaine.
Elle a déclaré :
« Infliger des blessures à tout enfant au cours d’un conflit est profondément choquant, et le meurtre et la mutilation de tant d’enfants cette année sont inadmissibles. »
Étant moi-même père, j’aurais utilisé un mot plus fort que « inadmissible ». Mais je m’en contenterai si le massacre israélien d’enfants palestiniens n’est plus nié ou marginalisé et s’il apparaît comme un sujet urgent et impératif dans les lieux où la communauté internationale discute des violations les plus graves des droits de l’homme à notre époque, et agit en conséquence.
Source : chroniquedePalestine